Imagina 2009, compte-rendu

04/02/2009 07:45

 IMAGINA 2009, impressions de visite.

 

Lancé aux débuts héroïques de la 3D, longtemps spécialisé dans l’imagerie de synthèse pour les jeux, le cinéma d’animation, la communication ou l’industrie, avec alors une section spécifique IMARA pour l’architecture et l’urbanisme, le salon IMAGINA s’est volontairement recentré depuis quelques années sur les domaines de l’architecture, de l’urbanisme, de l’environnement et du paysage.

 

Nous avons la chance de pouvoir nous y rendre depuis 3 ans, et assister à de nombreuses conférences de bonne tenue, complétées d’exposants présentant des produits et services variés. Nous vous proposons ici nos impressions de visite.

 

 

ARCHITECTURE

 

Nous avons particulièrement apprécié notre échange puis la conférence de Rudy Ricciotti. Après avoir affirmé « L’informatique j’y connais rien, je ne sais pas allumer un ordinateur, fallait pas m’inviter ! Des logiciels il y en a plein à l’agence, je sais seulement que ça me coûte très cher !», il a présenté certains de ses projets et la démarche de son agence, dans lesquels le numérique apparaît incontournable :

« L’informatique est un outil de travail indispensable,

-       l’architecte s’exprime par ses images,

-       le numérique fait parfois croire que l’on peut tout faire, il nous fait danser avec le diable, mais sans elle on ne pourrait pas présenter et réaliser les projets que nous avons en tête,

-       l’interface permanente architecte-ingénieur permet de passer de ces images au réel physique, au réel financier,

-       la forme est le résultat d’un travail commun architecte-ingénieur, le projet est le résultat d’une répartition des risques entre l’architecte et l’ingénieur, dans le dessein, cette démarche nécessite un travail commun itératif architecte-ingénieur, sur le dessin, la structure… « 

Pour finalement conclure :

« La délicatesse des outils numériques sert le projet, la magie du numérique, c’est le langage commun de disciplines qui se parlent peu »

 

On remarque lors des conférences architecture la tendance déjà perçue les années passées, dans la présentation de projets, qu’il s’agisse des modes de conception ou des opérations de communication :

-       L’approche latine de certaines agences françaises mets en avant l’image, les effets, la qualité de rendu, les outils ne sont pas présentés comme structurants, leur utilisation est banalisée, aucun enjeu ne semble leur être associé,

-       Les exemples anglo-saxons s’appuient sur des démarches structurées, des organisations s’appuyant volontairement sur des outils et des procédures, avec par exemple une réflexion poussée de l’agence SOM sur les phases successives d’un projet : Etudes locales, Design, Production, Collaboration. Les outils de type BIM y sont largement mis  contribution, d’une manière contrôlée et validée par les résultats.

-       Les outils dédié bâtiment BIM servent la démarche de projet, sont les moyens objectifs et efficaces de répondre aux attentes techniques, formelles, spatiales, d’ambiance, de productivité, d’échange et collaboration entre acteurs du projet. Les projets présentés prouvent que ces outils permettent de mettre en œuvre une volonté architecturale particulière, ou de tester le projet et effectuer diverses simulations techniques

-       On note aussi une convergence, au moins dans les discours, dans une approche globale qualitative et intégrée, depuis le composant industriel du bâtiment jusqu’au projet à l’échelle du territoire, notamment par la superposition partielle des standard IFC et CityGML : un projet de bâtiment BIM, riche de sa sémantique, pourra s’insérer dans une maquette de territoire, modélisée selon la norme CityGML, tout en préservant ses caractéristiques, son géoréférencement…

-       Le CSTB a fait deux présentations concrètes, la première basée sur les diverses possibilités de simulation (acoustique, sécurité, éclairage…) offertes par les maquettes numériques de projet, et l’autre sur l’actualité de la démarche IFC et du projet expert

 

 

TERRITOIRES

 

Les Villes étaient à ‘honneur, avec comme nouveauté de l’année : le « Village des Villes Numériques ». De nombreuses Villes ou communautés d’agglomération y présentaient leurs réalisations et leurs objectifs.

 

Du point de vue des maquettes numériques 3D de villes, les techniques et réalisations présentées sont d'un autre ordre : les édifices et objets existent dans le monde physique, leur modélisation a pour but de les restituer à leur emplacement géographique exact, dans leur enveloppe volumique et avec une représentation visuelle de réaliste à exacte.

Il ne s'agit pas ici d'accompagner directement la conception d'un projet mais de donner une représentation 3D réaliste de la ville existante dans laquelle l'observateur / visiteur pourra être convier à évoluer, dans laquelle on pourra insérer des projets futurs.

Les techniques et modalités de construction de ces  maquettes s'appuient pour la plupart sur des données institutionnelles: cadastre, BD topo IGN , photos aériennes. Une première représentation "visitable" sous la forme d'un modèle numérique d'élévation, est établi en ayant recours à la démarche bati-3D issue du laboratoire Cogit de l' IGN, sur lequel on projette des prises de vues verticales.

Sur cette base, géométriquement et géographiquement conforme, 2 démarches, le plus souvent complémentaires, permettent de disposer d'une maquette complète de la ville. Chaque bâtiment y est modélisé en 3D :

-       selon un modèle géotypique qui respecte son enveloppe géométrique, son emplacement géographique mais selon une représentation "typiquement" conforme " à la manière de" (pavillon type, immeuble collectif type, …);

-       selon un modèle géospécifique, réalisé par une modélisation 3D, plus ou moins détaillée classique habillée de photos et/ou de textures (ce pavillon, cet immeuble précis …)

Le tout permet d'obtenir des représentations d'un réalisme convaincant et aux capacités de navigation et de visite impressionnants (réactivité et fluidité de la navigation temps réel et interactive)

Hors les présentations de simulation acoustique et de circulation réalisées par le CSTB sur la ville de Cannes et ses environs les usages opérationnels présentés sont rares.

 Si de l'avis de tous ces projets de maquettes de ville trouvent un meilleur écho, un meilleur soutient, auprès des élus qui peuvent, au fil de l'avancement des réalisations, voir "pousser leur ville" les contenus restent limités à la seule dimension visuelle .

Pour chacune des réalisations les objectifs de débat public, insertion de projets futurs, de concertation des habitants sont mis en avant ou évoqués, mais non présentés. Est donnée, comme évidente et incontournable, la supériorité de la représentation 3D des villes sur les plans et cartes. Ces dernières seraient devenues maintenant "illisibles", voire incompréhensibles par le commun des mortels ( les plans de métro de la RATP ou plans cadastraux utilisés dans les débats publics de PLU ruraux ne s'adressent sans doute qu' à des experts ….)

De manière paradoxale le modèle numérique de ville semble, à y regarder de près, parcourir le chemin inverse du modèle BIM de bâtiment :

-       les SIG 2D mis en place dans les villes, aux représentations techniques précises mais peu chatoyantes, mettent l'accent sur la liaison et l'exploitation à des fins de simulation et de décisions, individuelles et/ou statistiques, entre les représentations géométriques et les contenus techniques, réglementaires, sémantiques qui leur sont liés

-       à l'inverse les maquettes 3D de ville  permettent de naviguer dans des représentations plus flatteuses, réputées plus compréhensibles par tous les publics mais sans contenus.

De cette manière il ne paraît pas établi que les décisions d'aménagement des villes , du point de vue social, du point de vue du développement durable, pour ne citer que ceux-ci,  s'en trouvent mieux éclairées.

OUTILS

 

On a logiquement remarqué de nombreux outils professionnels, plus ou moins sophistiqués, coûteux, complexes à mettre en œuvre et utiliser, bien qu’ils tendent à se mettre à la portée d’utilisateurs nouveaux et non spécialistes.

Mais il faut noter la présence désormais régulière à leur côté de SketchUp, outil d’esquisse architecturale et urbaine, simple et peu onéreux voire gratuit.

-       Ainsi, le CSTB propose un couplage avec TRNSYS pour effectuer des simulations thermiques sur la base d’une simple esquisse architecturale, gage d’une validation rapide et de possibilités de modifications immédiates par le concepteur, par un aller-retour effectué au sein même de l’agence.

-       Dans une logique tournée vers le grand public (ou utilisant des solutions qui lui sont plutôt destinées…), on assiste à une réelle appropriation de Google Earth par les professionnels, qui l’utilisent pour visualiser des projets de bâtiments ou d’interventions sur le territoire, les formats KML/KMZ de SketchUp étant régulièrement proposés en plus des formats techniques usuels (3DS ou IFC).

 

Concernant le territoire, les approches et les enjeux techniques sont diversifiés :

-       qui fabrique les données de base, et comment (la Ville, des prestataires privés, un organisme public comme l’IGN ?)

-       quels sont les usages actuels et futurs (information des élus, utilisations techniques et administratives, information et communication de la population, outils d’aide à la vente…)

-       quels sont les outils, depuis des systèmes classiques poussés dans leurs limites (3DS max), des outils novateurs procéduraux (LandSim 3D), des systèmes propriétaires (Vectuel Story, Nova)…

-       Au delà des techniques, émergent des questions de fond sur les usages réels et attendus, sur les modalités de saisie, mise à jour, propriété des bases de données, et même sur l’éthique indispensable à l’utilisation de tels outils.

 

 

FORMATION

 

Une rencontre entre représentants de différentes écoles a eu lieu en fin de salon, à l’ initiative du très actif Philippe Thebaud : ingénieurs, architectes, paysagistes, …

Tous sont d’accord sur la nécessité de faire se côtoyer les différents métiers, dans les cycles de formation initiale et continue, puis dans l’activité professionnelle. Il faut que les disciplines se connaissent, se parlent, collaborent. L’interdisciplinarité est nécessaire, prélude au travail collaboratif. Il faut améliorer le niveau de formation et de culture des acteurs de la ville. Il ne faut pas former chacun sans son coin, mais échanger les formations et les personnes compétentes. Il faut développer la culture et la capacité à travailler avec des gens d’autres disciplines, à dialoguer avec les autres métiers, et aussi avec les élus, avec le public.

On évoque aussi les besoins en formation, ou en personnel qualifié (en technique et en culture) au sein des collectivités, pour appréhender les enjeux et mettre en œuvre les solutions. Les collectivités vont intégrer la 3D plus vite que les SIG, il y a désormais un portage politique pour ces projets, qui est visible avec la 3D, aboutissement de l’investissement initial. Il faut donc des professionnelles pour cette prise en main.

On évoque aussi la nécessité d’un corps enseignant en phase avec le tissu professionnel, avec la réalité. Il faut des formations à la fois sur les outils mais aussi sur l’accompagnement du changement. Avec la sophistification et la complexité des outils, une seule personne ne peut posséder toutes les compétences nécessaires, d’où la nécessité d’équipes aux compétences complémentaires et croisées.

On évoque aussi la nécessaire complémentarité entre SAVOIRS : la connaissance des outils, SAVOIR FAIRE : mise en pratique effective sur des projets, SAVOIR ETRE : prise de position vis à vis des outils, de la pratique du paysage architectural. Les questions d’éthique viennent conclure ce débat, appelé à se prolonger prochainement.

 

 

 

André DEL, informaticien, urbaniste, Responsable Scientifique de l’équipe de recherche EVCAU, Paris.

Olivier CELNIK, architecte, enseignant à l’ENSA Paris Val-de-Seine, chercheur à l’EVCAU

 

 

Quelques liens utiles sur le web liés à IMAGINA :

https://www.imagina.mc/

(sections Architecture et Urbanisme, et Aménagement du Territoire)

https://www.lemoniteur.fr/P_article.php?id_DAM=640651 :

la vidéo « Ma Villa Cavrois », récompensée lors des Imagina Awards dans la catégorie « architecture, urbanisme et aménagement ». Un film élégant, sensible, didactique réalisé par l'école supérieure d'infographie Pôle 3D, qui propose une promenade virtuelle dans ce projet de Robert Mallet-Stevens.

https://www.btpinformatic.fr/

            la chaine vidéo du bâtiment diffuse de nombreux reportages et témoignages tournés sur le salon

 

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